Gabrielle
Mallet

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Sa barbe et sa fleur

14 Nov 2023

          Article sur les « transgenres polynésiens » :

Lors d’un premier voyage en Polynésie, on peut être surpris de rencontrer des hommes efféminés portant fort bien la fleur de frangipanier à l’oreille, voire une jolie robe colorée.

Reconnus pour leurs compétences dans le domaine du service, les touristes croisent leur regard et leur efficacité dans les restaurants et les hôtels des îles polynésiennes.

Charmé par le paysage et par la gentillesse des polynésiens, le touriste va vite s’imaginer, qu’il est facile de prendre cette voie, sur cette île paradisiaque. 

Grâce au bel ouvrage de Serge Tcherkézoff et surtout à la gentillesse de Tehani qui m’a consacrée du temps pour un entretien, j’ai pu mieux comprendre la place et le rôle social des transgenres polynésiens dans l’histoire, entre coutumes ancestrales et stéréotypes coloniaux.

Le « māhū » a toujours eu une place dans la société polynésienne en tant que personne née garçon, mais voulant vivre en fille. Investissant les domaines autrefois féminins ; Cuisine, couture voire danses traditionnelles, il pouvait vivre sa part féminine à des degrés divers en étant respecté dans son rôle social. Le «māhū » pouvant assumer à la fois sa barbe et sa fleur.

Plus tard, le « Raerae » fit son apparition s’adaptant à la fois, à la demande des voyageurs, en quête de relations exotiques et à la joie de se retrouver en communauté de pairs.

L’allure devient féminine, voire provocante, et c’est dans les grandes villes que le business commence.

Voilà pourquoi le terme de « Raerae » peut être vu comme péjoratif, car il est lourd d’une connotation liée au travail du sexe démarré dans les années 1960-70, n’intéressant pas la majorité de la population transgenre mais rendue plus visible et donc plus caricaturale.

Mais qu’en est-il de la condition actuelle à Papeete en 2023, d’une personne née avec un genre femme dans un corps d’homme…

est-elle encore en lien avec le «māhū » ou la «Raerae » ?

Une chose est sûre, c’est que ce qui est accepté dans la société est toujours plus difficile à accepter dans sa propre famille et cela n’est pas spécifique de la Polynésie.

Le transgenre polynésien n’est pas forcément accueilli avec le collier de fleurs, quand il révèle son « moi profond » à ses proches et que de « il », il devient « elle »….

Là encore, les générations se font plus compréhensives, (à l’image des mères surtout) mais le rejet et les coups peuvent malheureusement pleuvoir encore…

Chaque étape vers l’acceptation de son « moi intérieur » est un parcours plus ou moins difficile pour chacune d’entre elles ; changement d’État civil, changement de genre officiel acceptation au sein du milieu familial et professionnel, accessibilité au traitement hormonal et à la chirurgie de réassignation ; 

Le parcours peut être complet ou non, en fonction du désir et du budget de chacune…

Ce qui m’a interloqué, c’est que les gens qui côtoient d’une manière naturelle et quotidienne, ces personnes les qualifient souvent « d’homosexuels », mélangeant ainsi l’orientation et l’identité sexuelle.

Tehani n’est pas homosexuelle ; c’est une femme qui est née dans un corps d’homme, mais qui est femme dans son esprit depuis toujours ; elle se sent hétérosexuelle, puisqu’elle aime les hommes en étant une femme.

Cette confusion entre orientation sexuelle et identité sexuelle est hélas très fréquente ; voilà pourquoi je me permets de vous mettre le petit bonhomme du genre ainsi que la couverture du très beau livre qui m’a permis de mieux comprendre cette spécificité des transgenres polynésiens.

La vie s’enrichie de rencontres ; 

je remercie Tehani pour son histoire derrière son sourire et je la félicite du courage d’avoir su  rester fidèle à son « MOI ».

Merci à mes amis polynésiens de m’avoir permis de découvrir ce livre si éclairant.

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